3 juin 2013

Temps d’échanges: la planification et la gestion urbaine en Afrique

Le
mercredi 12 mars 2013 de 17h à 19h à Lyon, CODATU a organisé en partenariat avec l’Agence d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise et le CNAM Rhône-Alpes un deuxième temps d’échanges sur la planification et la gestion urbaine en Afrique. Deux interventions ont permis d’introduire ce thème:

Ce temps d’échanges a permis d’exposer des regards croisés sur les enjeux du développement urbain en Afrique et le rôle des transports dans la construction des villes africaines.

Les enjeux du développement urbain et la recherche de solutions stratégiques et identifiées

Bernard ARTHUR est intervenu sur les enjeux du développement urbain et la recherche de solutions stratégiques et identifiées. Les villes africaines sont toutes confrontées à une croissance rapide et exponentielle de leur population, associée, le plus souvent, à un étalement urbain. Ces phénomènes induisent généralement une demande de mobilité accrue et un besoin important en infrastructures de transport. Ainsi développement urbain et transports sont indissociables et sont sur le devant de la scène dans de nombreuses études réalisés par UN-HABITAT, AMCHUD, UNDP, UCLG.

Selon UN-HABITAT, les villes de l’Hémisphère Sud gagnent 1,2 millions d’habitants par semaine alors que celles de l’Hémisphère Nord gagnent 1,2 millions d’habitants par année. D’ici 2025, l’Afrique atteindra 642 millions de citadins, l’Europe, 566 millions, et l’Amérique Latine 560 millions. Pourtant l’Afrique reste l’une des régions les moins urbanisées de la planète.

M. ARTHUR a souligné le fait que les villes africaines ne sont pas reliées entre elles, elles ne communiquent pas ou peu et les transports de masse y sont très peu présents. Leurs densités sont très faibles et les périphéries s’étalent sans limites apparentes et, de manière discontinue, contenues par les seules contraintes géographiques du territoire. Face à cette dynamique, la planification urbaine doit prendre un rôle curratif plutôt que precriptif. Les projets de transport ont un rôle majeur dans ce sens.

Selon Bernard ARTHUR, le développement des villes africaines ne dépendrait pas des projets qu’elles développent mais bien de leur vision globale. De plus comme New York ou Londres sont connues comme des capitales financière, ou encore Paris comme la capitale mondiale du tourisme, les villes africaines doivent se construire une image. Certains grands projets sont en cours « Hope City » à Accra et « Eko Atlantic » à Lagos. Ces derniers vont changer l’image des villes africaines. Mais à quel point s’inscrivent-ils dans une vision de long terme des décideurs pour leur ville.

Lagos, ville dense comptant 18 millions d’habitants, est dépassée par une croissance démographique exponentielle, qui devrait atteindre 25 millions d’habitants en 2025. Le projet de BRT – Lite a été conduit par la direction de la Lagos Metropolitan Area Transport Authority (LAMATA). Il a été inauguré en 2008 sur 22 kilomètres en site propre, 3 terminus et 26 arrêts. Le BRT représente 25% des déplacements avec seulement 4% des véhicules, il offre alors une véritable alternative de transport collectif.

Accra, la capitale du Ghana qui s’étend sur 201 km² et compte 3 millions d’habitants devrait développe un projet de BRT qui devrait être d’un autre ordre. La ville connaît un fort taux de motorisation par rapport aux normes africaines : 90 véhicules pour 1000 habitants. 70% des déplacements dans la ville se font en bus. Le projet de BRT devrait permettre de désengorger le centre-ville.

Le modèle de développement multipolaire: une réponse à la congestion des centres-villes

Thibaut DESCROUX, Marie DOLS et Frank CHARLIN ont ensuite présenté les actions de l’agence d’urbanisme de Lyon dans le cadre de la coopération décentralisée du Grand Lyon avec les trois agglomérations de Rabat, Ouagadougou et Bamako. Toutes connaissent actuellement une forte croissance urbaine et ne possèdent pas encore de transports collectifs effectifs. Ces trois agglomérations se développent autour d’un hyper centre sous dimensionné et saturé. Pour l’agence d’urbanisme la problématique est de savoir si le modèle de développement multipolaire peut être une réponse à la congestion des centres-villes.

A Rabat, le centre historique est à proximité de la médina. Dans les années 70, la centralité s’est déplacée au sud à Agdal puis à Hay Riad où sont actuellement situés les ministères. Le développement du Tramway et la construction d’un nouveau pont n’ont pas permis le développement de Salé et Temara qui pourraient devenir deux nouvelles centralités afin de limiter les déplacements pendulaires. Les deux lignes de tramway présentent une offre concurrentielle à celle du bus et ne s’inscrivent pas dans une logique d’intermodalité. Pour faire face aux problèmes de congestion dans le centre de Rabat, un projet de contournement en Rocade permettrait de relier les différentes polarités et de soutenir le développement de Salé et Temara.

Ouagadougou est une ville très peu dense, ville sahélienne implantée sur un site géographique plat et sans contraintes, le développement urbain est extensible et l’habitat spontané informel très précaire. C’est une ville carrefour, traversée par 7 voies nationales. Le trafic est en forte augmentation et le nombre de deux roues motorisés explose avec l’arrivée de motos chinoises bon marché. Les projets autoroutiers lancés par l’Etat, omniprésent dans la gestion des infrastructures, favorisent les flux entrants dans le centre ville et donne lieu à des axes surdimensionnés. L’alternative proposée par la ville consiste à désengorger le centre ville en proposant la hiérarchisation du réseau viaire, le contournement du centre ville par une circulaire et l’identification de différents profiles de voies urbaines.

Le Code de l’Urbanisme est très récent au Burkina Faso et le premier Plan d’Occupation des Sols (POS) vient d’être rédigé. Bientôt en vigueur, ce POS permettrait de préserver des zones inconstructibles comme les zones maraîchères et de multiplier les dépôts de permis de construire qui sont aujourd’hui peu présents.

Avec 5,4% de croissance urbaine annuelle, Bamako, est une ville qui s’étale très rapidement. En 1883, les colons sont arrivés dans le village de Bamako qui s’est développé au XXème siècle sur la rive nord. En 1960, l’indépendance de la ville s’est accompagnée du franchissement du Niger. Depuis la ville se développe désormais au sud du fleuve, sur un territoire plat et sans contraintes. En 2011, Bamako est devenue une métropole dont les trois quarts de sa population résident au Sud du fleuve alors que le centre, sous dimensionné reste établi au Nord. La création de nouvelles centralités sur la rive Sud et le rééquilibrage des centralités sur les deux rives est un enjeu important pour la ville. Dans la ville où le taux de motorisation est encore faible, il est encore temps de proposer un mode de transport collectif qui viendrait apporter une solution adaptée.